Première neige

Eh oui, finalement, ce n'est pas la grande escroquerie, on ne nous a pas trompés sur la marchandise ni vendu des billets  pour une quelconque destination ensoleillée (on s'en doutait) et certainement ennuyeuse (on nous a déjà maintes fois prouvé le contraire). Depuis avant-hier les températures ont chuté à deux ou trois degrés, une chute régulière, en fait, rétrospectivement. Et fatalement...

Le plus drôle, avec la neige, c'est que son arrivée due au temps froid coïncide le plus souvent avec un superbe beau fixe. Et c'était le cas aujourd'hui... En remontant en bus vers le centre-ville, quelques sous-bois blanchis entre les arbres étaient irrégulièrement éclairés par les rayons du soleil, déjà si ras, mais vivifiant, au milieu d'un ciel où se mouvaient d'immenses nuages cotonneux. C'est étrange... le temps (temporel) a changé lui aussi. La nuit tombe désormais à six heures trente. Autant il est possible de se raccrocher, plus ou moins, à un rythme naturel dans une Europe plus méridionale, autant ici tout ce que l'on peut faire est de décrocher totalement, de s'inventer une temporalité parallèle, une horloge interne mentale qui déjà jongle avec les heures des repas jusqu'à les escamoter comme une noix sous trois gobelets. Un temps à soi et des aléthiomètres ineffables, inexplicables et indescriptibles.

Décidément, tout est voyage...

L'examen de Finnois a eu lieu jeudi dernier, ne reste plus à espérer que les résultats soient suffisants pour passer dans l'un des deux groupes de l'Elementary Course 2. J'ai pris énormément de retard dans le travail scolaire... Enfin, le système est très flexible ici, je me rattraperai plus tard - déjà cette semaine, challenge : lire Finland in the European Union. J'ai pris mes billets d'avion pour la Belgique, du 19 au 24. Je ne manifeste que peu d'enthousiasme à ce propos. Néanmoins... Je ne sais pas ; peut-être de revoir Bruxelles, de revoir ces gens, me les rappelleront à moi, et pourtant j'étais partie si insouciante... Peut-être la plus probable de mes craintes est celle de dissoudre mes quelques certitudes dans un tourbillon de lieux et d'identités - démantelée entre France, Belgique, Finlande, ne plus savoir où j'habite, qui je suis, où je veux être, transformer mes chez moi en lieux inhospitaliers et étrangers, instables. Peut-être devrais-je, enfin, compter sur les paroles d'Anne : "- Tu verras, faire une coupure te fera du bien... Tu seras encore plus contente de revenir !"
La filoute. Au moins nous avons ce sentiment en commun.

Ces choses fort conventionnelles mises de côté, le grand moment de cette semaine passée principalement à apprendre verbityyppit & sanotyyppit a certainement dû être le cours de danses finnoises. Laissant Anne dans son bus pour en théorie la retrouver ensuite à l'occasion de la grande beuverie studiantine annuelle tamperoise, je fais trois fois le tour des blocs à proximité de la Tuomiokirkko (celle dont les photos se trouvent dans l'album Tampere) avant de trouver finalement la rue. Trois étudiants sont assis sur un escalier, j'espère qu'ils parlent anglais... et finalement, je tombe sur Valeria, Francesca et Matteo qui se rendent au même cours que moi. Rencontre heureuse ! Rita, Irina, deux françaises et beaucoup d'autres filles (mais peu de représentants de la gente masculine pour notre plus grand désarroi) nous rejoindront dans le hall du bâtiment, avant de prendre part à un des cours de danse les plus drôles auxquels il m'ait été donné d'assister... La valse finlandaise est quelque chose de très drôle à apprendre, et surtout lorsqu'on a personne pour s'entraîner et que des années de danse jazz vous ont appris à tourner sur la jambe portée au premier pas et pas au second... Prochaine leçon : le foxtrott ! Et nous comptons bien recruter tous les garçons du Summer Course, qu'ils le veuillent ou non !

Malgré l'épuisement, et ce rythme que je ne parviens pas à m'imposer, trop indolente, je crois tenir une certaine dynamique, au point de me dire qu'un effort supplémentaire me permettrait de supporter les années que je passerais loin d'ici. Je l'espère... Jusqu'ici, j'ai couru ici et là presque tous les week-ends - à propos, un récit succinct et choisi des escapades tamperoises avec Nadia, ainsi que des photos que je regretterai certainement un jour d'avoir montrées, se trouvent sur son blog - mais le week-end qui s'annonce sera, pour ma plus grande félicité,  studieux et reposé. Je vais enfin pouvoir rattraper ce retard monstre que j'ai sur pas mal de plans, également...

C'est étrange, quelque chose me reste après tout cela sur le bout de la langue, je ne parviens pas à mettre le doigt dessus, comme une grande nouvelle qui m'emplit secrètement de joie et que j'aurais soudainement oubliée. Q'importe...

PS : Rajouté des photos du Alexis Kivi Day et de la neige dans cet album.